Le temps des devoirs est un sujet récurrent dans l’accompagnement parental. Pour de nombreuses familles, il devient une source de tension, parfois quotidienne, qui fragilise la relation entre parents et enfants. Pourtant, ce moment peut aussi se transformer en un espace d’apprentissage, de confiance et même de complicité, à condition d’installer une routine claire et adaptée.
En tant que professionnel de l’accompagnement parental, vous pouvez aider les familles à poser de nouvelles bases, notamment au moment de la rentrée, période propice aux bonnes résolutions. Voici quelques pistes à explorer et à transmettre aux parents pour qu’ils trouvent un équilibre durable.
Invitez les parents à prendre un temps de recul avec leur enfant pour identifier les points forts et les difficultés rencontrées l’année précédente. Questions à proposer :
Qu’est-ce qui s’est bien passé ?
Quels obstacles ont freiné la mise en place des devoirs ? (manque de concentration, conflits, surcharge, absence de cadre clair…)
Qu’aimerait changer l’enfant ou l’adolescent ?
L’objectif n’est pas de pointer des fautes, mais d’ouvrir un espace de dialogue constructif. Outil pour les pros : suggérez aux parents de proposer à leur enfant de dessiner ou d’écrire « sa routine idéale », afin de l’impliquer et de favoriser son implication.
Expliquez aux parents que l’environnement influe directement sur la qualité du temps de travail.
Un espace dédié : calme, ordonné, avec le matériel à disposition. Peu importe l’endroit, du moment qu’il est sécurisant (bureau dans la chambre, ou table de la cuisine proche du parent).
Limiter les distractions : pas de télévision en arrière-plan, ni de téléphone à proximité.
Un rituel d’entrée dans les devoirs : lumière allumée, respiration, verre d’eau… Ces micro-rituels aident le cerveau à se mettre en mode concentration.
Outil pour les pros : invitez les parents à tester différentes configurations pour trouver celle qui correspond le mieux au tempérament de leur enfant.
Une des difficultés majeures rencontrées par les parents est de trouver l’équilibre entre autorité et autonomie. Aidez-les à distinguer ce qui relève du cadre (non négociable) de ce qui peut être laissé au choix de l’enfant.
Le cadre parental : les devoirs doivent être faits avant le dîner.
L’autonomie de l’enfant : il peut choisir par quelle matière commencer, s’il fait une pause avant ou après, etc.
Cette approche renforce son sentiment de responsabilité. Astuce : recommander l’utilisation de minuteurs visuels ou d’outils ludiques (timer coloré, sablier) pour les plus jeunes.
Rappelez aux parents que la concentration est limitée par l’âge :
15 à 20 minutes pour un enfant de primaire,
30 à 40 minutes pour un collégien.
Encouragez-les à prévoir de courtes pauses actives (s’étirer, boire, respirer, raconter une blague ou un moment positif de la journée). Ces moments relancent l’énergie et réduisent les résistances.
Un point crucial à transmettre aux familles : les compliments doivent porter sur les efforts, pas uniquement sur les réussites.
Exemples à encourager :
« J’ai vu que tu t’es accroché malgré la difficulté. Bravo ! »
« Tu es resté concentré plus longtemps aujourd’hui. »
Cela développe l’estime de soi et le goût de l’effort.
Expliquez aux parents que le cadre gagne en efficacité lorsqu’il est associé à des conséquences claires, cohérentes et proportionnées.
En cas de réussite : valoriser, encourager, ou accorder un privilège (un moment ludique partagé, un temps de jeu supplémentaire…).
En cas de difficultés persistantes : le parent reprend temporairement la main sur l’organisation, tout en maintenant un rendez-vous pour réajuster ensemble. « Je vois que gérer ton temps reste difficile. Cette semaine, c’est moi qui vais décider de l’organisation, et on refait un point dimanche pour voir si tu veux réessayer seul. »
Cette dynamique montre à l’enfant que la liberté est liée à la responsabilité. Les règles ne sont pas négociables, mais qu’il existe toujours une possibilité de réajuster. L’ado doit comprendre que plus il respecte le cadre, moins son parent sera derrière lui.
Rappelez aux familles que la routine n’est jamais figée : les besoins évoluent avec l’âge, le niveau scolaire, la personnalité de l’enfant ou les événements de vie.
Proposez-leur de faire régulièrement un « check-up » :
Qu’est-ce qui fonctionne bien ?
Qu’est-ce qui reste compliqué ?
De quoi l’enfant aurait-il besoin en plus ?
Ces bilans récurrents favorisent la communication et évitent que les tensions ne s’installent durablement.
Souvent, les parents demandent à leurs enfants de faire preuve d’effort et de persévérance, sans toujours montrer concrètement comment cela se traduit dans leur propre vie. Or, l’imitation est l’un des moyens d’apprentissage les plus puissants chez l’enfant.
Encouragez les parents à verbaliser leurs propres efforts face à une tâche qu’ils n’aiment pas ou qu’ils trouvent difficile. Cela normalise la notion d’effort et montre que même les adultes doivent parfois se dépasser.
Exemples de phrases utiles :
« Je n’ai vraiment pas envie de faire le ménage, mais je vais m’y mettre maintenant.»
« Ce rapport de travail ne me motive pas, mais je vais le finir avant de me détendre et je vais laisser mon téléphone rangé pour être concentré. »
Ces petites mises en mots permettent à l’enfant de comprendre que l’effort est universel, qu’il fait partie de la vie de chacun, et qu’on peut trouver des stratégies pour s’y mettre malgré tout.
Outil pour les pros : incitez les parents à repérer une tâche qu’ils repoussent et à la transformer en “exemple vivant” devant leur enfant, en explicitant leur démarche.
Accompagner les parents dans la mise en place d’une routine de devoirs, ce n’est pas seulement leur donner des outils pratiques : c’est aussi les aider à construire un cadre sécurisant, à valoriser l’autonomie de leur enfant, et à incarner eux-mêmes les comportements qu’ils souhaitent transmettre.
En adoptant une posture d’exemple, en montrant leurs propres efforts et en partageant leurs stratégies, les parents donnent à leurs enfants une leçon précieuse : l’autonomie et la persévérance s’apprennent à tout âge.