La reprise de l’école est souvent une période stressante pour les familles : rythmes qui changent, routines à réinstaller, achats des fournitures, inscriptions aux activités, inquiétudes des enfants. Psychologue, travailleur social, éducateur spécialisé, nous sommes confrontés au stress (normal) des parents. Et ce n’est pas toujours facile de les accompagner alors que nous-mêmes vivons, souvent, les mêmes choses.
Il est important, dans un premier temps, de comprendre les sources de ce stress. Est-ce l’organisation ? Le rythme de vie ? Les exigences scolaires ?
Une étude de 2004, Parenting Stress de Deater-Deckard, éditée par Yale University Press, nous montre que le stress parental est lié à des facteurs contextuels, personnels et relationnels, et que le soutien social est un facteur protecteur majeur.
Ils peuvent être socio-économiques : faibles revenus, chômage, précarité.
Ils peuvent être organisationnels : horaires de travail atypiques, charge mentale importante.
Ils peuvent être événementiels : séparation, parent solo avec un ou plusieurs enfants, déménagement, handicap ou maladie dans la famille.
Ils peuvent être scolaires ou administratifs : lorsque l’enfant connaît des difficultés d’apprentissage et/ou de comportement.
Pour les familles dont l’un des enfants est porteur d’un trouble neurodéveloppemental diagnostiqué, par exemple, la reprise de l’école est synonyme de reprise des démarches administratives, des suivis de l’enfant (psychologiques, orthophoniques…), de relations souvent complexes avec l’équipe enseignante, etc.
Enfin, ils peuvent être liés à un manque de soutien social : isolement, absence de relais familiaux, réseau social absent ou peu soutenant. Et lorsque l’enfant est différent, le vide social se crée souvent rapidement : parce que l’on se replie sur soi, parce que les autres parents peuvent nous mettre à l’écart pour éviter la « contagion ».
Quant aux caractéristiques personnelles et relationnelles, un parent anxieux ou possédant des croyances éducatives figées verra également son stress augmenter durant cette période de transition. Ces croyances sont liées à notre éducation, mais peuvent également être liées à nos expériences passées.
Pour toutes ces raisons, aider les parents à reconnaître les manifestations du stress et à comprendre leurs mécanismes est fondamental. Et faire la différence entre un stress aigu et un stress chronique peut déjà beaucoup aider.
Le stress aigu est une réaction immédiate et ponctuelle à une situation perçue comme une perte de contrôle, liée à l’imprévisibilité, à la nouveauté ou à notre ego. Il est de courte durée et constitue une réponse adaptative normale de l’organisme. Une fois la situation résolue, il disparaît.
C’est le cas, par exemple, d’un retard à un rendez-vous, de la gestion d’une dispute entre enfants ou d’un mot inattendu du professeur dans le carnet.
Le stress chronique, quant à lui, résulte d’une exposition prolongée ou répétée à des situations stressantes, sans période de récupération suffisante, ce qui devient problématique.
Imaginons que, pour X raisons, nos enfants soient toujours en retard et nous mettent en retard, qu’ils se disputent sans arrêt, que nous soyons submergé·e·s par ces conflits, que les remarques dans le carnet soient régulières, que les dépenses liées aux suivis pèsent sur notre porte-monnaie, que les critiques de notre entourage sur notre éducation soient quotidiennes…
C’est le combo gagnant pour affecter notre santé physique, mentale et émotionnelle. Fatigue persistante, troubles du sommeil, irritabilité, douleurs, troubles de l’attention, anxiété, voire dépression ou burnout parental peuvent alors nous guetter.
Pratiquer la psychoéducation, bien sûr.
Aider les parents à reconnaître les manifestations du stress et à comprendre leurs mécanismes. En atelier ou en individuel, l’expérience des verres (de notre module APCOMM petite enfance) est très parlante pour beaucoup de parents. Présenter le modèle CINÉ de Sonia Lupien l’est aussi.
Les aider à repérer les situations tendues : celles où il y a perte de contrôle, celles qui sont imprévisibles et nous mettent à mal. Leur apprendre à mieux appréhender la nouveauté, à travailler l’ego en parlant de notre voix off et de la façon dont on peut l’apprivoiser.
Parler du fonctionnement du cerveau, des émotions de nos enfants, de nous, adultes, permet de prendre un peu de distance avec les stresseurs. Cela aide à relativiser et à mieux comprendre ce qui se joue dans ces moments-là.
Donner des outils de communication pour éviter les montées dans « les tours ». Connaître et apprendre à utiliser les mots qui apaisent, qui favorisent la coopération plutôt que la confrontation, est également nécessaire.
Effet « Kiss Cool » : cette façon de communiquer en famille pourra être utilisée avec l’école, avec les autres parents, dans notre travail.
Pratiquer l’écoute active, bien sûr. Avant de proposer des astuces, les parents ont besoin de se sentir écoutés, sans jugement, sans solutions toutes faites, sans question fermée.
Pour certains, la situation peut évoluer rapidement. Pour d’autres, cela prendra plus de temps. Apprenons à prendre le temps dans nos suivis.
– Favoriser les routines. Des heures fixes et des rituels de séparation aident à réduire l’anxiété des enfants et des parents (Evans & Wachs, 2010).
– Introduire des techniques de relaxation ou de cohérence cardiaque.
– Utiliser un calendrier mural, le Kanban (technique japonaise de planification des tâches), pratiquer la méthode POMODORO pour aller au bout des tâches…
Les propositions sont légion et doivent être présentées comme des options, pas comme des solutions miracles.
Tester et valider si cela nous convient. Car aucune solution n’est universelle, et toujours garder en tête que ce qui marche un jour peut ne pas fonctionner le lendemain – et que ce n’est pas un problème.
Enfin, parler d’essai et non d’échec ou d’erreur.
Le parent parfait n’existe pas. Et (essayer) d’incarner ce que nous proposons.